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17 juin 2008 2 17 /06 /juin /2008 21:00

Mardi 17 Juin 2008.

Quand on est prêtre, rendre témoignage au Christ est toujours un défi... On hésite toujours entre la nécessité de ce témoignage pour le monde: "Allez, je vous envoie..." et le risque que l'on prend de ne témoigner que de soi-même. En relisant ces lignes de Maurice Zundel qui est comme mon Frère en sacerdoce et en vie contemplative, je vous livre ici ma joie d'être prêtre aujourd'hui:

Ce texte de Zundel date de 1968...

"L'Eglise est en crise. Nous n'avons rien à dire si nous ne sommes pas dépouillés de nous-mêmes. Ce que c'est que d'être prêtre aujourd'hui. Le sacerdoce rejoint la vie monastique comme celle-ci féconde le sacerdoce. Un monde peut encore naître, RIEN N'EST PERDU.

L'Eglise est en crise. Il est inutile de le dissimuler. Il y a d'innombrables défections qui viennent toutes, finalement, de ce que Dieu a été vu du dehors et non pas du dedans, de ce que Dieu n'a pas été perçu comme la source de vie, de ce que Dieu n'a pas été expérimenté comme l'espace infini où la liberté se découvre et s'accomplit.
Et il est inutile de chercher des procédés, d'imaginer des trucs pour rassembler les nations dispersées: il n'y a qu'un seul témoignage aujourd'hui, un seul témoignage valable, un seul témoignage digne de respect, un seul témoignage qui puisse être une révélation du Dieu vivant, c'est notre propre désappropriation.

Nous n'avons rien à dire si nous ne sommes pas dépouillés de nous-mêmes. Nous n'avons rien à donner si nous sommes esclave de notre moi-complice. Nous pouvons parler de Dieu toute la journée, c'est en vain! Il s'agira toujours d'un faux dieu si nous n'en vivons pas. Le seul témoignage est le témoignage silencieux d'une vie qui est devenue silence, d'une vie qui fait le vide en soi pour accueillir l'Amour infini qui est Lui-même éternellement vidé de soi dans la procession des trois Personnes.

Etre prêtre aujourd'hui, ce devrait justement révéler l'homme à l'homme! Car, faire l'homme, le construire, le créer, le délivrer de ses chaînes, le promouvoir à sa dignité, c'est cela révéler Dieu. Car le vrai Dieu, tout dedans, tout intérieur, le vrai Dieu qui n'a pas de dehors, le vrai Dieu qui seul nous conduit au coeur de notre intimité, ce vrai Dieu ne peut se révéler authentiquement qu'à travers une humanité transfigurée, qu'à travers un visage qui laisse passer la lumière.
Etre prêtre aujourd'hui, c'est donc vivre en contemplatif, vivre dans un coeur à coeur incessant avec le Dieu intérieur à nous-mêmes.
Etre prêtre aujourd'hui, c'est laisser transparaître, sans en parler, cette présence adorable que l'on reconnaît toujours à cela même qu'elle ouvre un espace illimité où la vie enfin respire: ce serait ça être prêtre."

0803fl_etre_prtre
Ton Frère Bernard-Marie heureux d'être prêtre aujourd'hui.

"Ah! Que Dieu nous donne de devenir enfin des prêtres authentiques! Que Dieu nous donne d'abandonner les idoles, ou plutôt que Dieu nous donne de ne plus faire de Lui-même une idole en Lui imposant nos limites, en faisant de Lui, par nos refus, une irrecevable caricature!
Il y a donc aujourd'hui un témoignage que le prêtre peut rendre, qu'il est appelé à rendre d'une manière suprême, c'est le témoignage de la pauvreté intérieure, de la désappropriation de soi, de l'union profonde avec Dieu, de la transfiguration de l'homme libéré de lui-même et qui apporte aux autres, dans le respect et l'amour, la révélation de la grandeur humaine.
Ah! Il faut que cette grandeur humaine se réalise pour que Dieu à travers nous prenne toute sa taille, pour qu'il apparaisse enfin non pas comme le maître mais comme ce Coeur au coeur de notre coeur qui est la source d'une vie infinie.

Et c'est par là que le sacerdoce est inséparable d'une vie contemplative, car on ne peut pas par décret-loi, décider qu'on sera libéré de soi: on ne peut être libéré de soi que dans un dialogue permanent et sans cesse repris avec la présence intérieure à nous-mêmes, cette présence dont saint Augustin indiquait qu'elle est "plus intime à nous-mêmes que le plus intime de nous-mêmes."
Et c'est par là que le sacerdoce rejoint la vie monastique, comme la vie monastique féconde le sacerdoce. C'est une grâce immense qu'il y ait dans le monde ces jardins de Dieu où l'on respire le silence, ce silence tué partout, ce silence banni et piétiné, ce silence sans lequel il n'y a plus de musique, ni de connaissance, ni d'amour.
Il est infiniment heureux qu'il y ait ces jardins de Dieu que sont les monastères où l'on s'applique à écouter pour se transformer et où on accumule pour toute l'humanité ce trésor d'une présence divine qui se reverse sur toute l'humanité et sur tout l'univers.
Il y a un lien indissoluble entre le sacerdoce et la vie contemplative. Et malheur au prêtre qui pense qu'il peut, avec des méthodes et des artifices, suppléer à l'essentiel qui est de vivre Dieu pour en faire vivre autrui.
Aussi avons-nous besoin de nous appuyer sur les monastères, nous avons besoin de vocations monastiques, nous avons besoin de prêtres qui ne soient pas dispersés dans l'action mais qui soient reconcentrés dans la présence divine et puissent être pour le monde un évangile vivant.
Il n'y a pas besoin de parler, il n'y a pas besoin de se dépenser dans une action particulière, le vrai témoin de Dieu, c'est uniquement celui qui vit de Dieu, qui Le respire, qui Le porte dans tout son être et qui n'a pas même besoin de prononcer son nom pour qu'on Le reconnaisse immédiatement comme la source de toute vie.

Il est donc certain que, dans ce monde contestataire et déchiré, dans ce monde qui étouffe, dans ce monde qui s'asphyxie, dans ce monde de tumulte et de bruit - MAIS AUSSI DANS CE MONDE D'ASPIRATION ARDENTE ET GÉNÉREUSE - dans ce monde qui ne sait plus où trouver l'homme, dans ce monde qui a besoin de naître à une humanité authentique, il est certain que Dieu seul, le vrai Dieu, le Dieu caché en nous et qui nous attend au plus intime de nous-mêmes, il est certain que ce Dieu-là seul apporte une réponse: il y a un lien indissoluble entre Dieu et nous; nous trouver c'est Le trouver et Le trouver, c'est nous trouver, c'est une seule et même expérience de déboucher sur Lui et de rencontrer notre propre intimité.

Ah! Un monde peut encore naître! RIEN N'EST PERDU, l'univers peut encore prendre un sens en devenant l'ostensoir de Dieu et il ne peut le devenir que si nous-mêmes nous devenons l'ostensoir du Christ.
C'est dans la mesure où, sans rabâcher, sans moraliser, sans critiquer, sans revendiquer, c'est dans la mesure où notre présence sera une présence réelle, dans la mesure où nous nous tiendrons debout comme une offrande de lumière et d'amour, dans la mesure où nous respecterons en autrui cette présence adorable qui nous attend tous et chacun au plus intime de nous, c'est dans cette mesure que le monde retrouvera l'espérance dont il a besoin, l'espérance qui lui a été arrachée ou à laquelle il n'a pas pu atteindre, le plus souvent parce qu'il a vu en Dieu l'obstacle, la limite, la menace, le maître! Et bien! nous savons par Jésus-Christ, le Fils de l'Homme, qu'il n'en est rien! Nous savons par Jésus-Christ qu'au regard de Dieu la vie de l'homme pèse autant que sa propre vie.
Aussi, en entrant dans le silence de la divine liturgie, nous voulons écouter au plus profond de notre coeur l'appel de la "Beauté toujours ancienne et toujours nouvelle" pour expérimenter un peu, maintenant et chaque jour un peu mieux, que Dieu est la Vie de notre vie et que "désormais, vivante sera ma vie toute pleine de Toi!"

Merci Frère Maurice Zundel.

"Aucun canal, je le sais trop, disait Gustave Thibon, n'est digne de la Source. Et comme il est amer de ne pouvoir ni le briser puisqu'il transmet, ni le supporter puisqu'il trahit. Serviteur, non seulement inutile, mais infidèle... et nécessaire à cause du silence de Dieu..."

Oubliant le chemin parcouru, et tout tendu vers le but... avec la grâce de Dieu, ton Frère Bernard-Marie poursuit sa course... sa récompense: que tu poursuives la tienne... Bien à toi!

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